| 24/04/2015
Le Chemin de fer de la Jungfrau paré pour l’hiver
La locomotive chasse-neige de Stadler équipée du groupe propulseur d’ABB
Le Jungfraujoch est une attraction touristique de premier plan, même en hiver. Afin d’assurer un déneigement efficace, le Chemin de fer de la Jungfrau utilise une locomotive construite spécialement à cet effet par Stadler avec des turbo-fraises de Zaugg de chaque côté. ABB a fourni le groupe propulseur nécessaire à ce projet exceptionnel.
Le train menant au Jungfrauest l’une des attractions touristiques les plus renommées dansles hauteurs suisses. Plus de 800 000 personnes sont ainsi transportées chaque année jusqu’à la gare la plus haute d’Europe qui culmine à 3454 m au-dessus de la mer.
Le Chemin de fer de la Jungfrau, une véritable performance technique à l’époque de sa mise en service en 1912, ne fait pas de pause en hiver malgré sa haute altitude. Si les deux tiers du parcours s’effectuent dans des tunnels, la partie qui se trouve à l’air libre – entre Kleine Scheidegg et Eigergletscher, est quant à elle soumise aux éléments naturels. Or, dans cette région, l’hiver, la neige peut rapidement s’amonceler sur plusieurs mètres de hauteur.
Le Chemin de fer de la Jungfrau a mis en service le premier chasse-neige en 1937. En 1993, une turbo-fraise est venu compléter le vieux chasse-neige. La vitesse de dégagement de ces deux machines d’antan n’était évidemment pas très rapide. «Lorsqu’il fallait dégager la voie avant la première remontée, cela allait», explique Heinz Inäbnit, responsable des ateliers du Chemin de fer de la Jungfrau. «Cependant, en cas de chute de neige intensive ou de gros déplacements de neige sous l’effet de vents violents, il faut pouvoir dégager la neige du parcours pendant le service sans perturber l’horaire. Il est indispensable d’intervenir afin de garantir la sécurité du chemin de fer.»
Une turbo-fraise des deux côtés
Le Chemin de fer de la Jungfrau a commandé en 2011 la solution à tous les problèmes de déneigement sur les voies ferrées des Hautes Alpes: une locomotive à crémaillère de Stadler Bussnang AG spécialement conçue à cet effet avec de chaque côté une turbo-fraise à deux éléments de la société Zaugg AG, complétée par des éléments de charrue articulés et une puissante souffleuse.
Dans le secteur ferroviaire, les fraises à neige sont normalement préfixées à un véhicule de traction existant adapté. Dans cette version automotrice spécialement conçue pour le Chemin de fer de la Jungfrau, on a pu installer des fraises à neige sur les deux fronts. Cela permet d’évacuer la neige dans les deux sens, en amont et en aval du train, avec une portée réglable entre 15 et 35 m.
«Le montage de ces fraises des deux côtés exige néanmoins un châssis différent de celui que l’on trouve sur les locomotives à crémaillère construites jusqu’à présent par Stadler, à savoir une ossature en profilés carrés à la place d’une simple construction en tôle», précise Michael Burger, chef de projet technique de Stadler Bussnang AG.
La vitesse maximale réalisable spécifiée pour le Chemin de fer de la Jungfrau était de 25 km/h en amont et en aval pour permettre un déneigement intermédiaire toutes les demi-heures sans perturber l’horaire. Pour réaliser l’entraînement des deux moteurs tracteurs et des deux moteurs des chasse-neige, Stadler a opté pour un groupe propulseur d’ABB. Ce dernier est constitué d’un transformateur de traction sec LOT 600 et d’un convertisseur compact Bordline CC750 AC.
«En cas de chute de neige intensive ou de gros déplacements de neige sous l’effet de vents violents, il faut pouvoir dégager la neige du parcours pendant le service sans perturber l’horaire.»
Électrifié en courant triphasé
Le Chemin de fer de la Jungfrau est une des 4 uniques voies ferrées au monde électrifiées en courant triphasé, 1125 V et 50 Hz, les trois autres étant le Gornergratbahn en Suisse, le Chemin de Fer de la Rhune dans les Pyrénées françaises et le Chemin de fer du Corcovado à Rio de Janeiro). L’énergie électrique passe par deux pantographes doubles avant de parvenir dans le transformateur de traction qui transforme la tension en 400 V et alimente ainsi le convertisseur. Au moyen d’un enroulement auxiliaire séparé, le transformateur approvisionne aussi le réseau de bord de 400 V qui alimente lui-même des récepteurs tels que le chauffage des vitres, la souffleuse ou le système hydraulique.
Les convertisseurs utilisés pour les chemins de fer ne sont pas des produits standard, ils sont adaptés et optimisés pour chaque application. «Le concept, qui s’appuie sur la solution d’entraînement d’ABB utilisée pour le Gornergratbahn, incorpore les derniers progrès techniques en matière de traction. L’entraînement des fraises à neige est particulier au sens où un convertisseur actionne les moteurs de traction, tandis que le deuxième convertisseur alimente l’entraînement des chasseneige selon le sens de marche», explique Roland Wyser, chef d’équipe de Power Electronics Engineering pour ABB Traction à Turgi.
Parfaitement adapté aux conditions hivernales
Le convertisseur compact Bordline CC750 AC se distingue par sa grande densité de puissance et surtout par sa parfaite adéquation avec les conditions hivernales, ce qui est très important ici. Sa technologie IGBT à basse tension associée à une haute fréquence de commutation de 2 kHz donne un modèle de tension quasi-sinusoïdal, ce qui réduit les pertes et atténue la sollicitation du moteur de traction. Lors du freinage électrique, l’énergie est réinjectée dans le réseau via le convertisseur et le transformateur.
Cela fait deux hivers déjà que la locomotive chasse-neige, baptisée «Xhe rote 2/2 12», démontre son efficacité. Il s’agit d’une pièce unique, contrairement au groupe propulseur. En effet, le même modèle de transformateur et de convertisseur est à présent utilisé pour moderniser les huit automotrices doubles du Chemin de fer de la Jungfrau qui font actuellement l’objet d’une révision train après train dans le but de réduire les temps de parcours et d’améliorer le confort.